16 février 2012

Nucléaire : plus de leucémies chez les enfants près des centrales ?

le 12 janvier 2012 à 08h57 , mis à jour le 12 janvier 2012 à 13h08

Dossier : Le nucléaire

Une étude menée par des experts de la santé et de la sûreté nucléaire montre un nombre d'enfants atteints de leucémie deux fois plus important près des centrales nucléaires qu'ailleurs en France. Problème réel ou aléa statistique ? Pour l'heure, aucun lien évident n'est établi avec les radiations.

 


 

 
 
Centrale nucléaireImage d'archives © TF1/LCI

 

Pas de preuve. Tout au plus des présomptions. Et le besoin, surtout, d'études plus approfondies pour prendre la pleine mesure du problème. Une étude dirigée par le Dr Jacqueline Clavel, responsable d'épidémiologie environnementale des cancers à l'Inserm, et publiée cette semaine, a montré un excès de cas de leucémie de l'enfant près de 19 sites nucléaires français. Ces travaux, publiés sur le site du Journal international du cancer, n'établissent cependant pas de lien entre ces chiffres et la proximité des centrales nucléaires. Le réseau "Sortir du nucléaire" n'en a pas moins salué cette publication, jugeant qu'elle établissait "une corrélation très claire" entre la fréquence des leucémies infantiles aigües et la proximité descentrales nucléaires.

 

"C'est un résultat qui a été vérifié dans tous les sens et qui est statistiquement significatif et c'est vrai qu'il est assez surprenant par rapport aux études que nous avions faites auparavant", commente Dominique Laurier, responsable du laboratoire d'épidémiologie de l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) et co-auteur de l'étude. "Sur la période (allant de) 1990 à 2001, (...) on voyait une fréquence tout à fait normale et classique", ajoute-t-il. Entre 2002 et 2007, période à laquelle l'étude a été menée, 14 enfants de moins de 15 ans habitant dans un rayon de 5 kilomètres d'une centrale nucléaire ont été atteints de leucémie, rapporte l'étude. Cette fréquence est deux fois plus élevée que dans le reste du pays, où 2753 cas de leucémies infantiles ont été diagnostiqués sur la même période.

Premières hypothèses

Mais les effectifs étant très faibles, il convient d'interpréter ces résultats avec précaution, préviennent les chercheurs. Dominique Laurier recommande que davantage d'études sur les causes, notamment environnementales, des leucémies soient menées. De la même manière, le Dr Jacqueline Clavel se veut prudente et estime qu'un "lien avec les très faibles radiations ionisantes émises par les centrales en fonctionnement normal ne peut pas être établi. Le fait qu'il n'y ait pas une diminution du risque au fur et à mesure que l'on s'éloigne de la centrale n'est pas en faveur d'un facteur causal, c'est à dire qui permette d'attribuer l'excès de cas aux radiations". En outre, l'augmentation d'incidence "concerne toutes les tranches d'âges étudiées, et pas seulement les plus jeunes", souligne la chercheuse. L'étape suivante nécessaire serait donc de travailler à l'échelle internationale "pour avoir un plus grand nombre de cas", souligne-t-elle.

Cette étude n'est toutefois pas la seule en la matière. Une étude allemande avait montré un doublement des cas de leucémie spécifiquement chez les enfants de moins cinq ans résidant à proximité immédiate des centrales sur une longue période (en l'occurrence, entre 1980 et 2003). En France, l'augmentation relevée n'est "pas spécifique d'une centrale particulière ou d'un type particulier de centrale" et "aucun excès de risque de leucémie dans les zones les plus exposées aux rejets gazeux des centrales n'a été observé", note le Dr Jacqueline Clavel.

Les chercheurs soulèvent néanmoins d'ores et déjà des hypothèses qui pourraient expliquer le doublement de l'incidence des cas de leucémies aigües lymphoblastiques relevé. Parmi les facteurs potentiels en cause, les mélanges de population et l'exposition à des agents physiques naturels ou d'origine industrielle. La piste du mélange de populations est débattue : "les afflux de populations peuvent modifier l'équilibre immunitaire d'une population, vis-à-vis d'un agent infectieux comme des virus", indique le Dr Jacqueline Clavel. "De fait, quand on étudie le risque en fonction de mouvements de populations importants qui favorisent l'émergence d'épidémies, on observe des augmentations de risque", dit-elle. "Plusieurs études solides soutiennent cette hypothèse", ajoute la chercheuse. Mais certains experts estiment que cette théorie du mélange des populations ne cadre pas très bien avec l'étude allemande.

le 12 janvier 2012 à 08:57


16/02/2012
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